P.Francastel
– Sociology of art – Socio-psychological values
Our
age takes the view that social environment determines the forms of
thinking and it attaches to this thinking form a sort of autonomous
existence, removable of its means of expression. Our age imagines
ideas originated from an
entirety seeking to take form through the mean of languages, thereby
loosing sight of the indissoluble unity of the signifier (grapheme)
and the signified (meaning) of which the relation is always dialectic
and not causal. It is
therefore more often assumed that languages belong to the sphere of
information and not surprisingly this doctrine emerges stating two
contemporary thinking trends: scientism and romantic intuitionism.
When one lays down the principle that some existing values emanate
from human thought, one is immersed in immanence. The success of
media doctrines is the modern days form on neo-platonism.
During
the 15th
century, this doctrine evolved at the crossroads of an innovation of
scientific thought and metaphysics. We are now living through a new
era of conciliation of two important truths: the faith in an entirety
– social or divine – and the faith in techniques – including
those of reflexive thought.
Applied to arts, the
information doctrine thus designed implies the existence of an
imaginary model on which representative elements will be selected.
Raised up as a system, any
intellectual activity generates
a new issue of the real and imaginary. No form of creative expression
can provide a
solution, even the best one, to an
hypothesis derived from the exploration of the real world.
Abstraction does not lead to the discovery of an explanatory scheme
of the universe. Art, as any other languages, forms
a way to understand some lessons of experience, not in order to
provide an approximate solution to the universal riddle, but in order
to suggest differentiated modes of action.
There
is an artistic thinking, separated from the mathematical, or the
physical, biological or political thinking. This thinking possesses
the specific feature, among many others, to use a non-verbal media
and support. For this, it is with verbal and mathematical thinking,
one
of the three powers
of the human spirit. During the first years of the 20th
century, scientism was customary; the world was astonished by the
daily renewed applications of, not so much sciences, but rather of
techniques. The universe metamorphosed like a sort of spectacle of
mutations. Nothing was being more secure, during centuries, than the
physical environment of mankind; the only mirages men
were nourished and enchanted with, came from art or magic. And, as
once, a covenant was elaborated between art and magic, consequently
and even obviously, a new covenant between art and sciences was
rapidly sealed. Another obvious question is if, both concepts of
space and time have a character of reality or if we impose a
particular value of a conventional division, now outdated, of
mind activities. The dialectic of space and time is a permanent
element of figurative art. The human eye never catches a spectacle
without motion. The motion of the universe is eternal and our brain
activity permanent. The figurative image is still but its perception
mobile. To
see is an action, the mind is not passive, recording a different
visual representation different for each observer. Nowadays, the
mechanisms of vision, of interpreting figurative artworks generate
misinterpretation that stems from the fact that the public sees the
image based upon a class
of objects entirely different from objects and figurative signs of
the last five hundreds years. The photography widespread the idea of
a wider, instantaneous, automatic reading of any image. There is no
common appreciation between medieval image or at the Renaissance and
the contemporary image. Medieval compositions were linked to plays
of scenes from pious legends that played such an important role in
people's lives: Sacra
rappresentazione, Mystery plays. As
for both senses and spirit, images reflected, not a fluent
performance of the world, but knowledge developed for civilisations
through
several different experiences and tradition. They came to imagination
during long ritually orchestrated stands, slowly assimilated
according to a gradual execution and time impregnate this
knowledge guarantee of wisdom. We dug into the deep memory of both
what we saw and what we knew through which the dialectic between time
and space emerged much differently from what prevails today.
P.Francastel
- Sociologie de l'art – valeurs socio-psychologiques
Notre
époque considère que c'est le milieu social qui conditionne les
formes de la pensée et elle attribue à cette pensée une sorte
d'existence autonome, détachable de ses moyens d'expression. Elle
imagine que les idées naissent en quelque sorte dans l'absolu et
qu'elles cherchent ensuite à « s'incarner » par le moyen
des langages, perdant ainsi de vue l'indissoluble unité du
signifiant et du signifié dont le rapport est toujours dialectique
et nullement causal. On considère ainsi de plus en plus, que les
langages appartiennent au domaine de l'information et il n'est pas
surprenant de constater la rencontre de cette doctrine de deux
grands courants de la pensée contemporaine : le scientisme et
l'intuitionnisme romantique. Lorsqu'on pose en principe qu'il existe
des valeurs préexistantes aux activités de la pensée, on plonge
nécessairement dans l'immanence. Le succès des doctrines de
l'information, c'est la forme moderne du néo-platonisme.
Au
15ème siècle également, cette doctrine s'était développée au
point de rencontre d'un renouveau de la pensée scientifique et de la
métaphysique. Nous vivons de nouveau une ère de conciliation entre
deux vérités : celle de la foi dans un absolu – social ou
divin – et celle de la foi dans les techniques – y compris celles
de la pensée réflexive. Appliquée aux arts, la doctrine ainsi
conçue de l'information implique l'existence d'un modèle imaginaire
en fonction duquel se fait la sélection des éléments
représentatifs. Le problème de la réalité des mathématiques
n'est pas moins actuel que celui des rapports de l'art avec l'esprit.
Erigée en système, n'importe quelle activité intellectuelle
engendre de nouvelle problématiques du réel et de l'imaginaire. Il
n'y a jamais fermeture du cercle, adéquation de l'expression et du
réel. Aucune forme d'expression n'apporte de « solution »,
fût-elle la meilleure possible, à une hypothèse déduite de
l'exploration du réel. L'abstraction n'engendre pas la découverte
du schème explicatif de l'univers. L'art, comme tous les langages,
est une manière d'enregistrer certaines leçons de l'expérience,
non pas afin de nous fournir la solution approchée de l'énigme
universelle, mais afin de nous suggérer des modes d'action
différenciés.
Il
existe une pensée plastique, distincte de la pensée mathématique,
ou de la pensée physique, ou de la pensée biologique, ou de la
pensée politique. Cette pensée possède ce trait particulier parmi
beaucoup d'autres d'utiliser un médium ou un support non-verbal. A
ce titre, elle est avec la pensée verbale et la pensée mathématique
une des trois puissances de l'esprit humain. Dans les premières
années du 20ème siècle, la mode était au scientisme ; le
monde était saisi d'étonnement devant les applications chaque jour
renouvelées non pas tant des sciences que des techniques. L'univers
se métamorphosait comme une sorte de spectacle à transformation.
Rien n'avait semblé plus sûr, pendant des siècles, que
l'environnement physique de l'homme ; les seuls mirages dont
celui-ci s'était nourri et enchanté, lui étaient venus de l'art ou
de la magie. Et comme, jadis, un pacte s'était établi entre l'art
et la magie, il est naturel qu'entre l'art et la science un nouveau
pacte se soit vite scellé. On peut naturellement se demander si,
réellement, les deux notions d'espace et de temps possèdent un
caractère de réalité ou bien si nous leur accordons une valeur que
dans le découpage entièrement conventionnel, et aujourd'hui
dépassé, des activités de l'esprit. La dialectique de l'espace et
du temps est un élément permanent de toute création figurative.
Notre œil ne saisit jamais un spectacle immobilisé. Le mouvement de
l'univers est éternel et l'activité de notre cerveau permanente.
L'image figurative est fixe, mais sa perception est mobile. C'est une
action que de voir, l'esprit n'est pas passif, enregistreur d'une
représentation qui est différente pour chaque observateur. De nos
jours les mécanismes de vision, de lecture des ouvrages figuratifs
suscitent des fausses interprétations qui viennent du fait que le
public voit l'image en fonction d'une catégorie d'objets entièrement
différente des objets et des signes figuratifs ayant eu cours durant
les cinq derniers siècles. C'est la photo qui a répandu cette idée
d'une lecture globale, instantanée, automatique de toute image. Il
n'existe aucune commune mesure entre la situation de l'image au
Moyen-Age ou même à la Renaissance et de nos jours. Les
compositions médiévales se liaient avec des spectacles en action
qui jouaient dans la vie des hommes un si grand rôle:Sacra
rappresentazione, Mystères.
Aussi bien par les sens que par l'esprit, les images renvoyaient non
pas au spectacle fluent du monde, mais à des connaissances élaborées
au niveau des civilisations. C'étaient des sommes d'expérience et
de tradition. Elles s'imposaient à l'imagination au cours de longues
stations rituellement orchestrées, on les assimilait lentement, en
fonction d'une lente maturation et le temps les imprégnait parce
qu'elles formaient le dépôt d'une longue sagesse. On puisait à la
fois dans sa mémoire des choses vues et des choses sues, par quoi
s'établissait une dialectique de l'espace et du temps toute
différente de celle qui prévaut aujourd'hui.
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