7/25/2013

The construction of collective identities according to Central Asian professional statutes (risāla)

This article deals with the construction of collective identity among craftsmen in the predominantly sedentary regions of Western and Eastern Turkestan during pre-colonial and colonial times (nineteenth and twentieth centuries). Although it has been widely acknowledged that profession and especially affiliation to a professional group serve as a source for the construction of identity, we do not know much about the precise mechanisms through which these identity markers operate. This study is based on the research of about two hundred “crafts’ statutes” (risāla), the only kind of text originating in the craftsmen’s milieu proper which we possess. We see that the cohesion of a professional group rests largely, at least ideally speaking, on the perception of an imagined shared ancestry for each professional group.

The risāla is the only original text from craftsmanship environment we possess. This narrative is written in vernacular language (turkī, ouzbek, persan-tadjik, ouïgour, pachto), interspersed with prayers in Arabic, depicting the basis of a professional group. A unifying text  that creates a spirit of brotherhood among the same corporate group members. Three key elements are to be found in the risāla, the religious legitimisation of the professional activity, the transfer of spiritual knowledge and the emergence of an identity affiliation. The risāla makes a clear distinction between the master craftsmen who perform their kasb and don’t own a personal copy of the risāla or without following its prescriptions and those who work as affiliated to the pir of the profession through one risāla. To ignore the pir founder of the profession and to refuse to follow the guidelines of the risāla make the practice of the profession soiled, illegitimate in the religious significance, ḥarām .

In the spoken languages of the Central Asian region, two words show descent through lineage: šaǧara and silsila. The šaǧara refers to consanguineous relation; the silsila to a spiritual relation. Thus the risāla refers to the belonging to a silsila – a spiritual lineage of legendary master craftsmen – and gives value to loyalty and solidarity. Jeanine Elif Dağyeli

La construction des identités collectives d’après les chartes des corps de métier (risāla) en Asie centrale.

Cet article se propose d’explorer les formes de construction identitaire propres aux communautés d’artisans des régions sédentaires du Turkestan occidental et oriental, dans la période précoloniale et coloniale (XIXe et XXe siècles). Malgré l’insistance répétée sur le fait que la profession, et plus encore l’appartenance à un corps de métier, servent communément de fondement à l’identité, les mécanismes par lesquels se manifestent de tels marqueurs identitaires restent peu connus. L’étude est basée sur l’analyse d’environ deux cents “chartes de corps de métier” (risāla), seul type de texte original issu du milieu artisanal lui-même dont nous disposions. Nous verrons que la cohésion d’un groupe professionnel est fondée, au moins idéalement, sur la revendication d’une appartenance à une lignée imaginaire de maîtres ancestraux pour chaque corps de métier.
La risāla est le seul type de texte original issu du milieu artisanal lui-même dont nous disposions. C’est un récit écrit en langue vernaculaire (turkī, ouzbek, persan-tadjik, ouïgour, pachto), entrecoupé de prières en arabe, qui retrace le fondement d’un groupe professionnel. Texte unificateur, il crée un esprit de fraternité entre les membres d’une même corporation. Les trois éléments-clés de la risāla sont la légitimation religieuse de l’activité professionnelle, le transfert du savoir spirituel et l’évocation d’une affiliation identitaire. La risāla fait une nette distinction entre les maîtres artisans qui exercent leur kasb sans posséder une copie personnelle de la risāla ou sans se conformer à ses directives et ceux qui l’exercent en étant affiliés aux pīr de la profession grâce à une risāla. Ignorer le pīr fondateur de sa profession et refuser de se conformer aux directives de la risāla rend l’exercice et le produit de l’activité professionnelle souillée, illégitime au sens religieux du terme, ḥarām.
Dans les langues centrasiatiques, deux termes désignent la descendance par lignée : 
šaǧara et silsila. La šaǧara renvoie à une filiation consanguine ; la silsila, à une filiation spirituelle. La risāla évoque l’appartenance à une silsila – celle d’une lignée spirituelle de maîtres artisans légendaires – et valorise les rapports de loyauté et de solidarité. Jeanine Elif Dağyeli 
Susani art - Uzbekistan

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