Humanitarian Ideology - Humanitarian
ideology encompasses a set of representations responsible for the global
managing (multinational, state and non-governmental) of victims of conflicts
and natural disasters (both natural and political) and of a part of those marginalized
excluded from distribution of wealth. This humanitarian managing causes
representations. Humanitarian aid finds roots in shock and outraging caused by the
perception of a drama violating human dignity. Following the emotional trauma
comes a humanitarian disapproval founded on standards and values in conformity
with a judgment over this outraging submitted situation. Such a process of
emotion-condemnation finds its main motivator in 'humanitarian show' through
the media. These shows feature disaster victims, in distress, in danger and,
with an 'ascending vacuum extraction effect' other people delivering
assistance. This picture overwhelmed-devastated is a major ingredient to
humanitarian ideology. It shows the bad living and our well-being, it
broadcasts repeated signs of a world with disaster and misery. It is the main
evidence of, not only the setting out facts of which the presence is the
accuracy of analysis that often leads to the lack of another analysis about
causes and consequences of the featured situations. Everything is told, nothing
is explained. It is the advantage of images and the ideological construct that
tell what we want them to tell, unequivocal, right-thinking. These consensual
representation of other human beings, other communities are generated by a work
of building with an coherently articulation of emotions, postulates,
hierarchies and values, that is to say a set of convergent representations
through which one finds an ideological vulgate, a belief made of the lowest
common denominators, moral, political, social, cultural. There, fear of the
poor, emotion and distant caring for others, worrying about barbarism,
disapproval when confronted to foreign communities, finally false compassion and
fear of the Other inextricably blended. Such a hotchpotch of contradictory or
ambivalent emotions lends itself to all airy fairy designs rather than to real
knowledge and this is what makes this ideological building of an hegemonic body
of representations. On the other side of this ideological chain buoyed by these
representations, humanitarian ideology is setting itself as the moral side of
the global neoliberal world. It is the main
tool of moral globalization, an attempt to establish universal standards
and values through a global consensus conducted in connection with relocated
transnational values that make thinkable onto acceptable exclusionary effects
produced by deregulated global capitalism. Increased exploitation characterized
by economical globalization assumes 'moral safety valves' intended to reaffirm
values and to reassure through producing meaning outside the daily alienation.
Taking a look on far away victims allows one to avoid quantifying close
excluded people, and even worse to measure one's own social-economical order oppression.
This humanitarian moral, showing us there is poorer, comforts us as much as it
moves us. It is an invitation to have correct emotions, feelings for far away
victims we will never concretely meet and to accept the constraints of our own
world, of our own society that is so generous since capable to be moved by the
misery of others. And because others misery entertains us to blind us to our
own, it needs this truly spectacular staging. A rescue without witness is a
cause without object. Showing becomes then a fundamental necessary need to
humanitarian ideology. But who is the Other they show us all the time, we never
meet, who is kept to remain a Victim in this common humanitarian vulgate?
Humanitarian
ideology is based on the western postulate of the universality of human rights.
It is its main support. A conception that finds its roots in the western world
implemented by the Westerners. It is obvious that human dignity must be
asserted and defended. But beyond this principle implementation and
orchestration of this conception are questionable for it imposes a
Western-centric sense that is not to be taken for granted by the majority of
human kind.
Texte intégral en français ici : http://jda.revues.org/3084
Idéologie
humanitaire - L’idéologie humanitaire, c’est l’ensemble des
représentations qui provoquent la gestion planétaire
(multinationale, étatique, non gouvernementale) des victimes des conflits et
des catastrophes (tant naturelles que politiques) et d’une part des exclus des
processus de distribution des richesses. Cette gestion humanitaire provoque
elle-même des représentations. L’humanitaire commence par l’émoi,
l’indignation provoquée par la perception d’un drame attentatoire à la dignité.
Après le choc émotionnel survient la réprobation humanitaire, fondée sur des
normes et des valeurs qui permettent de juger scandaleuse la situation
présentée. Un tel processus d’émotion-réprobation, trouve son principal ressort
dans les spectacles humanitaires programmés par les médias. Ces spectacles
mettent en scène des gens sinistrés, en détresse, en danger et, par un effet
d’aspiration, d’autres gens qui leurs portent secours. L’image accablante
et accablée est un ingrédient capital dans l’idéologie humanitaire. Elle montre
le mal et notre bien, elle diffuse les signes répétés d’un univers de
catastrophe et de misère. Elle constitue la preuve principale, non seulement de
faits présentés, mais aussi de la véracité des analyses dont ils sont l’objet
qui souvent confine à l’absence d’analyse sur les causes et les conséquences
des situations montrées. Tout est dit et rien n’est expliqué. C’est l’avantage
des images et les constructions idéologiques qui disent ce qu’on leur fait
dire, univoques, bien pensantes. Ces
représentations consensuelles sur d’autres hommes, d’autres sociétés, sont
produites par un travail de construction idéologique où sont articulés de façon
cohérente des émotions, des postulats, des hiérarchies et des valeurs,
c’est-à-dire tout un paquet de représentations convergentes par lesquelles on
définit une vulgate idéologique, une croyance partagée faite de plus petits
communs dénominateurs moraux, politiques, sociaux, culturels. S’y télescopent
crainte des pauvres, émotion et sollicitude pour le malheur d’autrui à
distance, inquiétude sur la barbarie, réprobation devant des sociétés
étrangères, finalement fausse compassion et peur de l’autre indissolublement
mélangées. Un tel fatras d’émotions contradictoires ou ambivalentes se prête à
tous les habillages plutôt qu’à une vraie connaissance et c’est en quoi il se
prête à la construction idéologique d’un corpus hégémonique de représentations.
A l’autre bout de la chaîne idéologique qui se nourrit de ces représentations,
l’idéologie humanitaire se présente d’autre part comme le volet moral du monde
global néolibéral. Elle est l’outil principal d’une globalisation morale,
c’est-à-dire d’une tentative pour instaurer des normes et valeurs universelles,
à partir d’un consensus planétaire réalisé autour de valeurs transnationales
délocalisées qui rendent pensables puis acceptables les effets d’exclusion
produits par le capitalisme mondial dérégulé. L’exploitation démultipliée par
laquelle se caractérise la mondialisation économique suppose des
« soupapes morales » destinées à réaffirmer des valeurs et à rassurer
tout en produisant du sens hors de l’aliénation quotidienne. En portant le
regard sur des victimes lointaines on peut ainsi éviter de trop dénombrer les
exclus proches, et pis de mesurer l’oppression de l’ordre socio-économique sur
soi-même. Cette morale humanitaire, en nous disant qu’il y a plus malheureux
que nous, et surtout en le montrant et en le remontrant, nous rassure autant
qu’elle nous émeut. Elle nous invite à nous émouvoir à bon escient pour ces
victimes lointaines avec lesquelles nous n’aurons jamais aucun rapport concret
et à accepter les contraintes imposées dans notre univers proche, dans notre
société si généreuse qu’elle est même apte à s’émouvoir d’autres misères que
les siennes. C’est parce que la misère d’autrui nous distrait de notre propre
misère que des mises en scènes spectaculaires sont nécessaires. Un sauvetage
sans témoins est une cause sans objet. Faire voir est ainsi une nécessité
fondamentale pour l’idéologie humanitaire. Mais qui est cet autre qui nous est
en permanence montré et avec lequel nous n’entretenons aucun rapport, sinon
celui abstrait de salvateur à victime, dans la vulgate humanitaire
partagée ?
L’idéologie
humanitaire repose sur le postulat occidental de l’universalité des droits de
l’homme abstraits. C’est son principal appui. Il s’agit d’une conception née en
Occident et mise en œuvre par des occidentaux. Que la dignité des hommes doive
être affirmée et défendue est bien évident. Mais au-delà de ce principe, c’est
toute la mise en œuvre et l’orchestration qui pose question car elle impose un
sens occidentalo-centré qui ne va pas de soi pour la majorité de l’humanité.
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