1/06/2014

Bir arazi için kişinin bağlantı – milliyet, doğum yeri (jus soli) – topraklarının hukuk (lex loci)

Gortyne Law Table 480 BC.
The Territorial Inscription of Laws
The notion of space, in legal terminology, is not some Cartesian abstraction, which may be applied to any sort of place. Until recently the term was used exclusively to refer to parts of the world which cannot be occupied on a lasting basis because they have no perceptible limits and are unfit for human life. Such are the seas and the oceans, the skies and interstellar space. In law, the Earth is not conceived as an abstract space but rather as a mesh of territories, domains (public or private), regions or countries, jurisdictions and sometimes sites or zones (subject to overriding clauses). Significantly, it was only with the advent of globalisation that the notion of space began to be used to refer to the earth and not only the skies or the seas.
Inhabiting the world: the institution of territories Just as all cosmogonies show the birth of the Heavens and the Earth from the cosmic Ocean, so they all affirm the earthly substance of the human being. Adam, the first man in the religions of the Book, derives his name from the red earth (adama) from which God fashioned him. Man’s name comes from the Latin humus (damp earth): man (homo) is the one who comes from the earth and is destined to return to it (to be inhumed). Although born of the earth, man is endowed with a divine spirit which entitles him to take possession of it, to fashion it in his image and to make it fruitful by his labour. This second aspect – the “taking of land”, taking possession by labour or force – has been dominant in the modern Western world, at the cost of repressing how man belongs to the land. This lop-sided vision, whose religious origins we can only surmise, sees nothing but the imprint of man on the earth and remains blind to the imprint of the earth on man. In the legal sphere, a person’s connection to the land continues to inform decisions on two fundamental issues: the determination of his or her identity and the laws which he or she must observe. The question of identity arises in matters of personal status. Connection to a territory plays a role here through what is today called nationality law. “Nationality” is related etymologically to “being born”, and it situates each of us, as from birth, at the juncture of a territory and a lineage. Conse- quently nationality law combines considerations of the place of birth (jus soli) with that of the nationality of the parents (jus sanguinis) in different pro- portions depending on the country, to which should be added the possibil- ity of acquiring one or more other nationalities later and hence having adoptive homelands. Nationality, which is an element of identity in the legal sense, is the source of personal status, that is, of a non-negotiable set of rights and duties towards the State or States of which one is a national.

In Europe, the invasion and dislocation of the Roman Empire led to populations living to- gether while obeying different laws. The new barbarian masters followed their various customs while the descendants of the subjects of the Empire (and the Church) remained subject to a largely adulterated version of “Roman law”. In this system, which lasted from the fifth to the eleventh century, each person lived by the law of his origins, that is, of his ethnic group. This principle, which was called the personality of laws, was undermined by the mingling of populations and the rise of feudalism, which led to the same local or regional customs, the same law of the place (lex loci), being applied to all the inhabitants of the same seigniory. This is how the principle of the territoriality of laws gained currency, and its progress accompanied that of the Nation State. Alain Supiot

L’inscription territoriale des lois
Dans le vocabulaire juridique, la notion d’espace n’était pas jusqu’à une date récente une abstraction cartésienne, susceptible de s’appliquer à toute espèce de lieu. Son emploi était réservé aux parties du monde qui, n’ayant pas de limites discernables et étant impropres à la vie humaine, ne peuvent être durablement occupées: les mers et les océans, les airs et l’univers interstellaire. La Terre. Cette dernière n’était pas appréhendée par le Droit comme un espace abstrait, mais comme un entrelacs de territoires, de domaines (public ou privés), de régions ou de pays, de ressorts, parfois de sites ou de zones (soumises à des règles dérogatoires). Fait significatif: c’est seulement dans le contexte de la création d’une ‘globalisation des marchés’ que la notion d’espace a commencé d’être employée pour désigner la terre et non pas seulement le ciel ou les océans.
Habiter le monde: l’institution des territoires
De même que toutes les cosmogonies font naître le Ciel et la Terre de l’Océan cosmique, de même elles s’accordent sur la substance terrienne de l’être humain. Adam, le premier homme des religions du Livre, tire son nom de la terre rouge (adama) avec laquelle Dieu le façonna et le nom de l’homme lui-même vient du latin humus (terre humide): l’homme c’est celui qui vient de la terre, et qui est destiné à y retourner, à y être inhumé. Né de la terre, il est toutefois animé d’un esprit divin, qui l’autorise à prendre possession d’elle, à la modeler à son image et à la féconder par son labeur. C’est ce second versant – celui de la «prise de terre», de sa prise de possession par le travail ou par les armes – qui a largement dominé l’Occident moderne, au prix d’un refoulement de l’appartenance de l’homme à la terre. Cette vision borgne, dont on peut conjecturer l’origine religieuse, n’aperçoit que l’empreinte de l’homme sur la terre et demeure aveugle à l’empreinte de la terre sur les hommes. Dans l’ordre juridique, le rattachement de l’homme à la terre continue de se manifester dans le règlement de deux questions fondamentales: celle de son identité, et celle de la détermination des lois qu’il doit observer. La question de l’identité concerne l’état des personnes et le rattachement territorial s’y trouve à l’œuvre dans ce que l’on appelle aujourd’hui le droit de la nationalité. Le mot vient du verbe «naître», et la nationalité situe chacun de nous, dès la naissance, à l’intersection d’un territoire et d’une filiation. Le droit de la nationalité combine en effet, dans des proportions qui varient selon les pays, la considération du lieu de naissance (jus soli) et celle de la nationalité des parents (jus sanguinis), à quoi il faut ajouter la possibilité d’acquérir ultérieurement une ou plusieurs autres nationalités et d’avoir ainsi des terres d’adoption. Élément de l’identité, au sens juridique du mot, la nationalité est la source d’un statut personnel, c’est-à-dire d’un ensemble non négociable de droits et de devoirs vis-à-vis de l’État ou des États dont on est ressortissant.

L’invasion et la dislocation de l’Empire romain avaient conduit à la cohabitation en Europe de populations qui relevaient de lois différentes. Les nouveaux maîtres barbares étaient régis par leurs coutumes respectives, tandis que les descendants des sujets de l’Empire (et l’Église) demeuraient soumis à une «loi romaine» plus ou moins dégradée. Dans ce système, qui perdura du Ve au XIe siècle, chacun vit sous sa loi d’origine, c’est-à-dire celle de son ethnie. Ce principe, dit de la personnalité des lois, s’éroda du fait du brassage des populations et de l’essor de la féodalité, qui conduisit à imposer les mêmes coutumes locales ou régionales, la même loi du territoire (lex loci), à tous les habitants d’une même seigneurie. S’affirma ainsi le principe dit de la territorialité des lois, dont l’essor accompagna celui des États nations. Alain Supiot.


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