Judges and societies in
transition - The trial
of Socrates took place in 399 B.C., four years after the reinstatement of the
Athenian democracy which had been overthrown by the infamous oligarchy of the
Thirty, a violent episode in which Critias and Charmides, two former associates
of Socrates, were involved. Subsequently, Socrates and his teachings were no
longer considered as being so harmless, but rather quite perilous as they had
allegedly incited and corrupted the minds of the young thus leading to these
violent episodes in Athenian history. In relation to that accusation, this
editorial already raised the question: “what might have prompted a society that
deemed itself civilized and democratic to condemn to death this old
man”? A partial answer must be sought after in the field of
‘transitional justice’: the difficult choices a society faces when
transitioning from violent, undemocratic regimes to peaceful, democratic ones.
While the word ‘transition’ is rather self-evident: passing from one condition
to the other, justice in this field, as in any, is more elusive. ‘Justice
in transition’ (two words which seem to be somewhat of a mismatch) can take
many shapes and forms. One might seek the truth about the painful past, and in
return proclaim a sweeping or limited amnesty for the actors responsible for
those actions; one might seek to prosecute and punish the persons involved,
applying a wide range of punishments; or as an alternative one might seek to
reconcile the citizens through a process of dialogue, education and uncovering
the truth of the difficult past. The role of the judge in this process of
transition can range from rather marginal to absolutely pivotal, and Marek
Safjan, president of the Polish Constitutional Court from 1997 to 2006, explains
the challenges faced by a constitutional court in finding a balance between
different and competing rationales for lustration in transitional societies.
Indeed, ‘transitional justice’ brings with it the challenge of being
‘temporary’, a notion which does not fit well with ‘justice’, per se.
Hence, when seeking to purify the new Polish democracy of its potential
‘contaminants’ from the communist past, judges were and are faced with a
difficult balancing exercise. When the court is represented with the societal
choice for retributive justice, it needs to act in conformity with what is
perceived to be the public interest: the prosecution of collaborators with the
former regime; but it evidently seeks to commit itself to the democratic values
that have been re-instated, and hence it seeks to respect the individual rights
of the ‘wrongdoers’. In adjudicating such cases, the judge not only
has great power, but also great societal responsibility. Safjan’s contribution
gives the reader an insider’s opinion on the approach followed by
the Polish Constitutional Court in its case-law, when faced with
exactly that dilemma. He argues that only a well balanced attitude manifested
by the series of the judgments of the constitutional court allowed the real revolutionary
and radical break from the totalitarian past.
Darinka
Piqani’s contribution also looks to the future, but shifts the focus from the
national legal order to the European legal order, and discusses the power and
role of constitutional courts of central and Eastern European countries (CEEC)
in the integration of these countries into the European Union. Through an
analysis of pre- and post-accession case law, she finds that there too, the
judges were aware of their broader societal role. On the one hand, she finds
through an exegesis of relevant CEEC case-law that the constitutional courts
adopted a friendly, pro-European stance, welcoming the political changes;
while, on the other hand, not losing sight of their role and allegiance to
their own national constitutions and the fundamental rights contained therein. Bart Van Vooren
Les magistrats dans les pays en transition - Le procès de Socrate en 399 av. JC, avait lieu
quatre ans après la réaffirmation de la démocratie athénienne, qui avait été
renversée par le tristement célèbre gouvernement oligarchique des Trente
tyrans, un épisode violent au cours duquel Critias et Charmide, deux anciens
collaborateurs de Socrate se rendirent célèbres. Par suite logique, les
enseignements de Socrate n'étaient plus envisagés comme aussi inoffensifs ; ils
auraient incité et corrompu la jeunesse avec pour conséquences ces évènements
violents de l'histoire d'Athènes et en tant que tels étaient considérés comme
dangereux. Par rapport à cette accusation, nous avons déjà tenté de répondre à
la question : "qu'est-ce qui a conduit cette société qui se considérait
civilisée et démocratique à condamner à mort ce vieil homme ? " Une partie
de la réponse peut se trouver dans le domaine de la 'justice transitionnelle' :
les choix difficiles que les pays aux régimes violents non-démocratiques
doivent affronter quand ils évoluent vers des processus démocratiques
pacifiques. Le terme 'transition' parait évident, passer d'un état à un autre,
dans le domaine de la justice il devient insaisissable. Justice transitionnelle
(deux mots qui ne paraissent pas s'harmoniser) peut avoir plusieurs
significations. On peut chercher la vérité dans un passé douloureux et par
suite annoncer une amnistie conséquente ou limitée pour les acteurs
responsables; on peut chercher à poursuivre et punir les personnes impliquées
en faisant usage d'un vaste barème des peines; ou subsidiairement on peut
chercher à réconcilier les citoyens grâce au dialogue, à l'éducation et en
conférant les moyens d'accès à la vérité d'un passé difficile. Au cours de ce
procédé de transition, le rôle du magistrat peut rester marginal ou bien
devenir essentiel, Marek Safjan, président de la Cour constitutionnelle
polonaise de 1997 à 2006 montre que les défis de la Cour Constitutionnelle se
situent au niveau de la recherche d'un équilibre entre les différentes logiques
de procédure de lustration, d'actions menées dans des pays à régimes
transitoires. En effet la justice transitionnelle a pour effet de garder un
caractère temporaire, une notion qui accompagne difficilement la notion de
justice. Ainsi au cours des actions menées afin de 'purifier' la nouvelle
démocratie polonaise des agent 'contaminants' du passé communiste, les
magistrats se sont retrouvés et encore de nos jours face à un exercice
d'équilibre de taille. Lorsqu'un pays veut faire appel à la justice rétributive
devant la cour, cette dernière doit agir en conformité avec ce qui est perçu
comme d'intérêt public : poursuivre les collaborateurs avec l'ancien régime;
chercher à s'engager pour les nouvelles valeurs démocratiques établies, et donc
respecter les droits individuels des coupables. En statuant sur de tels cas,
l'incontestable pouvoir du juge doit s'accompagner d'une grande responsabilité
des valeurs sociales. Safjan donne un aperçu d'initié sur l'approche choisie
par la Cour Constitutionnelle polonaise dans sa jurisprudence pour affronter
exactement les mêmes dilemmes. Il affirme que seule une attitude parfaitement neutre au cours
d'une série de telles décisions de la Cour Constitutionnelle a permis à la révolution
de parvenir à la rupture radicale d'avec son passé totalitaire.
La
contribution de Darinka Pigani est aussi ouverte sur l'avenir, mais son attention
sur le problème principal se déplace d'un ordre juridique national vers un
ordre juridique européen en examinant le pouvoir et le rôle des Cours constitutionnelles
des pays de l'Europe Centrale et Orientale (PECO) dans leur intégration au sein
de l'Union Européenne. Grâce à l'analyse des jurisprudences précédant et
suivant l'adhésion elle estime que les magistrats étaient conscients de la
croissance de leur rôle de responsables des valeurs sociales. Puis grâce à une exégèse de jurisprudences
pertinentes des PECO elle considère, d'une part, que les Cours constitutionnelles
ont adopté une posture pro-Européenne en se félicitant des changements
politiques, alors que d'autre part, elles ne perdent pas de vue leur rôle et
leur allégeance à leur propre Constitution Nationale et les droits fondamentaux
qui les composent. Bart Van Vooren
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire