Money of pearls:
presence of the dead and measure of time
To start abolishing chaos, one has to take measure of the world and of
time, one has to count, to measure, to punctuate, to give values to all
appearances, to all events. In the ‘are’are’ cultural context the general
measure is called taha ni 'aa, which
means ‘the opening of the thing’. It is used to measure vertical rectilinear
lengths like the height of a tree, or horizontal like the side line of the
house or the garden. But this ‘opening of the thing’ measures as well the
length of a pearl necklace carved in the shell that one uses t as money.
Whereas the extent of the forest, of the sky and of the sea cannot be
measured, while the day and the night cannot be divided in time measure, yet
all events of a man or a woman, of a genealogical lineage, of a hamlet, of a
territory can be measured and compared using the pearls money. This money
allows people to get horticulture and animals products, to face up compensations
for marriage or murder, to relaunch war or peace, to support in a general way
all human actions through the powers of magic and/or of the dead.
In order to make possible some events, one has to ‘do the opening of the
thing’; this way four measures of money are used for the first marital money
that allows the fiancé to get his sweetheart next to him. Similarly, the
performance of very dangerous rituals as those before a murder requires the
future murderer to offer four measures of money to the man who will guide him
to the grave of a prestigious ancestor able to assist the murder and to protect
against revenge. For the funerals, the moneys are lent to the gravediggers or
the ones who celebrate. In fact after they shared the money with their kindred,
the gravediggers will have to reconvene the money during the funeral ceremony
organized as the counterpart some 3 years later. Therefore the money of each
dead breaks into a new monetary value for the new dead.
No doubt we now understand the extraordinary fascination of money since
it allows people to take the measure of time and of events throughout men life
until their complete disappearing beyond and onto the land of the dead. Daniel de Coppet
La monnaie de perles : présence des morts et mesure du temps
Pour commencer
d'abolir le chaos, il faut prendre mesure du monde et du temps, il faut
compter, mesurer, rythmer, et donner valeurs à toutes les apparences, à tous
les événements. Dans le contexte culturel 'are'are’, la mesure importante porte
le nom de taha ni 'aa, c'est-à-dire «
l'ouverture de la chose ». Elle sert à mesurer des longueurs rectilignes
verticales comme la hauteur d'un arbre, ou horizontales comme les côtés d'une maison
ou d'un jardin. Mais ‘l’ouverture de la chose’ mesure également la longueur
d'un collier de perles taillées dans le coquillage et qui sert de monnaie.
Tandis que l'étendue
de la forêt, celle du ciel et de la mer ne se laissent pas mesurer, tandis que
la durée du jour et de la nuit ne se laissent pas diviser, au contraire tous
les événements de la vie d'un homme, d'une femme, d'une ligne généalogique,
d'un hameau, d'un territoire se mesurent et se comparent par le truchement de
la monnaie de perles. Elle permet de se procurer les produits de l'horticulture
et de l'élevage, de faire face aux compensations pour mariage ou pour meurtre,
de relancer la guerre ou la paix, de soutenir de façon générale toutes les
entreprises humaines grâce aux pouvoirs de la magie et /ou des morts.
Afin de rendre
possibles certains évènements on doit ‘faire l’ouverture de la chose’ ;
ainsi quatre mesures de monnaie servent à la première prestation matrimoniale
qui permet au fiancé de faire conduire auprès de lui sa belle. De même
l'accomplissement de rituels particulièrement dangereux comme ceux qui
précèdent un meurtre, oblige le futur meurtrier à offrir un ensemble de quatre mesures
à celui qui voudra bien le conduire auprès de la tombe d'un ancêtre
prestigieux, capable à la fois de favoriser le meurtre et de parer à la
vengeance. Pour les funérailles, les monnaies sont prêtées aux fossoyeurs ou
aux officiants pour une durée variable. En effet le groupe des fossoyeurs,
après avoir partagé ces monnaies entre tous les siens, devra, quelques trois
années plus tard, les réunir à nouveau au cours de la fête funéraire « de
retour ». Ainsi la valeur monétaire de chaque mort se fractionne pour composer
la valeur monétaire des nouveaux morts.
On comprend mieux
sans doute l'extraordinaire fascination qu'exerce la monnaie, puisqu'elle
permet de prendre la mesure du temps et celle des événements qui jalonnent la
vie des hommes jusqu'à leur complète disparition par-delà le pays des morts. Daniel de Coppet In: L'Homme, 1970, tome 10 n°1. pp. 17-39.
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