Poverty Law: research on justiciability of social rights
The thesis presented and examined here is:
justiciability of social rights would transform the characteristic of these
rights. For a part of legal doctrine and in a sense more forcefully for a part
of political doctrine of social rights, justiciability is not condemned but
would consist of the dilution of social rights onto ordinary rights. A first
approach considers the characteristic of social rights as independent from
legal recognition, or in any case from justiciability; it is pre-existing and,
legal recognition, more particularly justiciability, is a changing of
characteristic from one form of rights to another. For the second approach,
conceptually, it is necessary to stipulate definitions that allow, from one
hand, distinguishing various categories on the other hand accountability for
the changes because of this very like justiciability. On the contrary better is
to follow the agreed language and keep as initial analysis the words 'rights'
and 'social rights' for legal system objects. Thus conceptually two
consequences emerge: on the one hand idle social rights not legally recognized
remain as claims; on the other hand legal recognition of these claims transforms
these idle 'social rights' into real 'rights'.
As a first step, claims of social rights will be legally recognized through the
affirmation of those rights within national or valid international bodies:
secondly this first recognition is also a claim for effectiveness from the legal
enforceability of such established rights and their justiciability. When not
justiciable, social rights remain imperfect rights. Binary understanding
considers that only justiciability is the recognition of the social claim,
initially a claim outside the legal system then transformed into an official right, it produces a moral
practices directive. There are social rights only where there is a moral
practices directive (an affirmation from a valid legal instrument of an official
claim for effectiveness) received by a judge who effectively uses it to oppose,
contain and repair a social injustice. But if social rights are indeed rights,
therefore have the structural characteristics of all other rights, they are
ordinary rights. Thus conferring upon them legitimacy and strength,
justiciability of social rights is not but an inclusion in legal arsenal, it is
above all the introducing of a juridical resource for the tools for struggle
against social injustice. The claim of social justice, and its dynamic use, continuously
renewed and being challenged on its legitimacy matter and because of new
modalities through, technical, social , economic, ideological etc evolutions,
is to become effective with justiciability, even if this claim recognition is
insufficient to ensure social justice. Justiciability of social rights does not
oblige the struggle against social injustice to occur within the courts nor
that form and content against social injustice become embodied in the form and
content of justiciable social rights. When confronted to a specific situation
of facing feelings of social injustice or a claim of social principles, it is
likely that judicial process of justiciability is not the most efficient nor
beneficial. However, struggle for social justice is not simple and during
action it always calls for a situational analysis and a resolution proposing strategy.
Within this strategy, justiciability does not impede action, on the contrary
building on existing internal constraints of the legal system and through the
legitimacy given to the legal argument in justice system it (justiciability of
social rights) becomes an additional resource when used correctly.
Droits des
pauvres, pauvres droits ? Recherches sur la
justiciabilité des droits sociaux
La thèse que l’on veut ici présenter
et discuter est la suivante : la justiciabilité des droits sociaux transformerait
la nature de ces droits. Pour une partie de la doctrine juridique, et peut-être
de manière encore plus forte pour une partie de la doctrine politique des
droits sociaux, la judiciarisation, qui n’est pas nécessairement condamnée en
tant que telle, comporterait au minimum un risque de dilution des droits
sociaux dans les droits ordinaires. Il s’agit dans une première approche de
considérer que la nature des droits sociaux est indépendante d’une consécration
juridique, en tout cas d’une justiciabilité ; qu’elle lui est préexistante et
que la consécration juridique, et particulièrement la justiciabilité, est un
changement de nature, d’une forme de droits à une autre. Dans la seconde, conceptuellement,
il est nécessaire simplement de stipuler des définitions qui permettent d’une
part de distinguer les catégories en présence, d’autre part de rendre compte
des changements de catégories du fait du phénomène que nous appelons
justiciabilité. Il vaut mieux au contraire suivre le langage commun et réserver
en première analyse les mots « droits » et « droits sociaux » à des objets
connus des systèmes juridiques : affirmés ou justiciables. Conceptuellement
alors, deux conséquences apparaissent : d’une part les prétendus droits sociaux
non juridiquement consacrés ne sont que des revendications ; d’autre part la consécration juridique de
ces revendications fait de ces prétendus « droits sociaux » de véritables «
droits ». Dans un premier temps, des revendications de droits sociaux sont
consacrées juridiquement par l’affirmation de ces droits dans des instruments
nationaux ou internationaux valides : dans un second temps, cette première
consécration est aussi une revendication d’effectivité, qui proviendra de
l’opposabilité de ces droits juridiquement affirmés et de leur justiciabilité.
Non justiciables, les droits sociaux sont des droits, mais imparfaits. La
conception binaire considère quant à elle que seule la justiciabilité est une
consécration de la revendication, initialement externe au système juridique
puis transformée en revendication officielle, elle produit des effets de
directive pratique morale. Il n’y a de droits sociaux que lorsque une
directive pratique morale (une affirmation dans un instrument juridique valide
d’une revendication officielle d’effectivité) est reçue par un juge qui s’en
sert effectivement pour s’opposer ou contenir ou réparer une injustice sociale.
Mais les droits sociaux, s’ils sont des droits, ont les propriétés
structurelles de tous les autres droits : ils ne sont que des droits
ordinaires. La justiciabilité des droits sociaux n’est pas simplement
l’inscription des droits sociaux dans l’arsenal juridique, leur conférant une
légitimité et une force ; elle est aussi et surtout l’inscription de la
ressource juridique dans les outils de la lutte contre l’injustice sociale. La
revendication de justice sociale, qui est une revendication dynamique, sans
cesse renouvelée face à des remises en cause permanentes de sa légitimité, et
devant sans cesse faire face à des nouvelles modalités de remise en cause avec
les évolutions techniques, sociales, économiques, idéologiques, etc., gagne en
efficacité avec la justiciabilité, même si cette forme de reconnaissance de la
revendication est définitivement insuffisante à elle seule pour assurer la
justice sociale.
La
justiciabilité des droits sociaux ne contraint ni à ce que la lutte contre
l’injustice sociale se déroule exclusivement dans les prétoires, et sous la
forme d’une revendication du respect des droits juridiquement affirmés, ni à ce
que les contenus et formes de la lutte contre l’injustice sociale s’incarnent
dans les contenus et formes des droits sociaux justiciables. Face à une
situation donnée où l’on ressent pratiquement un sentiment d’injustice sociale,
ou face à une revendication de principes de justice sociale dans un contexte donné,
il est tout à fait possible que la voie juridictionnelle qu’ouvre la
justiciabilité ne soit ni la plus efficace, ni la plus opportune. Mais la lutte
contre l’injustice sociale n’est pas une affaire simple, et elle appelle à
chaque moment, dans l’action, une analyse de la situation et la détermination
d’une stratégie. Dans cette stratégie, la justiciabilité n’est pas un frein ;
c’est au contraire, en s’appuyant sur les contraintes internes qu’elle fait
naître dans le système juridique, et sur la légitimité qu’elle confère à
l’argument dans le système juridique, une ressource supplémentaire si elle est
utilisée à bon escient.
Éric Millard, « Conclusion. La
justiciabilité des droits sociaux : une question théorique et politique », La
Revue des droits de l’homme [En ligne], 1 | 2012, mis en ligne le 30 juin
2012, consulté le 27 mars 2014. URL : http://
revdh.revues.org/159
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