Prayers and the Law. - Meeting points between prayers and the law are
many, including in France where, because of the separation between the Church
and the State, one would be entitled to consider such junctures as illegitimate
if not impossible since prayer is linked to the religious and therefore the
private sphere whereas law concerns justice and therefore the public sphere. Borders
between the private and public spheres are less inviolable and the
relationships between religion and the law much closer that at first sight. It
starts by describing the religious law systems (canon law, charia, halakha)
elaborated outside the national laws, recalls the diversity of religious links
between the State and religion (theocracy, monarchy by divine right, State
religion – with our without recognition of the tolerated religious minorities
–, religion of the majority, pluralism, Concordat, secularism, separation,
State atheism) and the plurality of levels and sources of normativity inside
the religious systems. It then focuses on prayer itself and describes its
various aspects. As a matter of fact, prayer is no more monolithic than is the
law. Solitary or collective practice, spontaneous or regulated expression of
faith, of religious feeling or denomination belonging, identity or community
assertion, prayer is diverse in its forms and contents as well as in its
usages. Social or militant action, as soon as it takes the risk of going beyond
the border of the private sphere or the religious, prayer meets the law. Spontaneous
or standardized, individual or collective, religious or confessional prayer follows
on tradition to which it remains linked as much as through form and content. Everyone
prays according to a unique transmitted ritual or a tradition. However, all without
exception must respect the law of the country and existing rules in places
where they perform acts of religious devotion. Above all and in particular,
when this place is public and not intended to be place of prayer, whether a
workplace, educational facility, hospital, prison, station or airport, in a train
or a plane ... : so as not to hinder, not to impede others activity, not to
shock those who do not share the same religion nor faith, so as not to encroach
values, symbols and other principles such as religious neutrality in public
spaces ... All at some point are confronted with law. As for collective prayer,
in order to be in accordance with the traditional and religious standards in question, the faithful should have access
to places and institutional framework for their religious activities.
Therefore, the meeting between the law of one country and arrangements
governing relations religion/State cannot be avoided. Under regimes of
Separation, with a view to see the law respected in principles and applications,
the guarantor authorities ensure that prayer benefits of conditions determined
and authorized by law. This is the double requirement imposed by secularism :
religious freedom and religious invisibility in public space.
Which
arguments can law and secularism oppose to this statement ? The Republic did
not provide secularist rituals to pay a solemn tribute to national scale
disasters' victims not for the great figures funerals. In the absence of a secular
alternative, it is compelled to draw on available cultural and symbolic resources.
In the first case, intra religious ceremonies are organized bringing together
main religious denominations representatives. As for national funerals, one
cannot be truly surprised to see the requested religious sphere to achieve its
religious mandate.
Les
prières et le droit. - Les points
de rencontre entre prière et droit sont nombreux, y compris en France où, du
fait de la Séparation, on serait fondé à considérer de telles rencontres comme
illégitimes sinon impossibles, la prière se référant au religieux donc à la
sphère privée et le droit à la justice donc à la sphère publique. Cet essai se
propose de démontrer que dans la réalité, les cloisons entre le privé et le
public sont moins étanches et les relations entre la religion et le droit plus
étroites qu’il n’y paraît. Après avoir évoqué les systèmes de droit
religieux (droit canon, charia,
halakha) produits en marge des droits nationaux, rappelé la
diversité des liens juridiques entre État et religion (théocratie, monarchie de
droit divin, religion d’État – avec ou sans reconnaissance de minorités
religieuses tolérées –, religion de la majorité, pluralisme, Concordat,
laïcité, séparation, athéisme d’État) et la pluralité des niveaux et sources de
normativité au sein même des systèmes religieux, l’article se concentre sur la
prière et en décline les différents aspects. En effet, la prière n’est pas plus
monolithique que le droit. Exercice solitaire ou pratique collective,
expression spontanée ou normée de la foi, du sentiment religieux ou de
l’appartenance confessionnelle, affirmation identitaire ou communautaire, la
prière est diverse dans ses formes et ses contenus comme dans ses usages. Acte
social ou militant, dès lors qu’elle se risque à franchir le seuil de la sphère
privée du religieux, la prière rencontre la loi. Qu’elle soit spontanée ou
normée, individuelle ou collective, la prière à caractère religieux ou
confessionnel s’inscrit dans une tradition à laquelle elle reste liée tant par
la forme que par les contenus. Chacun prie conformément à un rite ou à une
tradition qui lui a été transmise et qui lui est propre. Cela étant, tous sans
exception doivent veiller à respecter la loi du pays et les règles en vigueur
dans le lieu où ils accomplissent leurs dévotions. Surtout, et en particulier,
si ce lieu est public et n’a pas vocation à être un lieu de prière, qu’il
s’agisse du lieu de travail, d’un établissement scolaire, d’un hôpital, d’une
prison, d’une gare ou d’un aéroport, d’un train ou d’un avion,… : ne pas
nuire à l’ordre public, ne pas gêner le service ou l’activité, ne pas choquer
ceux qui ne partagent ni la même religion ni la même foi, ne pas porter atteinte
aux valeurs, symboles et autres principes qui forment le socle commun de la
société, tels que la neutralité religieuse de l’espace public ... Tous, à un
moment ou à un autre, se trouvent confrontés à la loi. Quant à la prière
collective, pour être en conformité avec la norme imposée par la tradition et
l’institution religieuse concernées, elle doit pouvoir disposer de lieux et de
cadres institutionnels propres à son exercice. Ce faisant, elle ne peut éviter
la rencontre avec la loi du pays et des dispositifs qui régissent les relations
religion/État. Quant à la prière collective, pour être en conformité avec la
norme imposée par la tradition et l’institution religieuse concernées, elle
doit pouvoir disposer de lieux et de cadres institutionnels propres à son
exercice. Ce faisant, elle ne peut éviter la rencontre avec la loi du pays et
des dispositifs qui régissent les relations religion/État. En régime de
Séparation, par souci de voir cette loi respectée dans ses principes et dans
ses applications, ceux et celles qui s’en portent garants sont là pour veiller
à ce que la prière bénéficie des conditions d’exercice autorisées par la loi,
tout en restant circonscrite dans les limites fixées par la loi. C’est là la
double exigence portée par la laïcité : liberté religieuse et invisibilité
religieuse dans l’espace public.
Quels
arguments le droit et la laïcité peuvent-ils opposer à ce constat : la
République n’a pas prévu de rituels laïcs pour rendre l’hommage solennel dû aux
victimes des catastrophes d’ampleur nationale ni pour les obsèques de ses
grands hommes. Faute d’alternative laïque, elle se voit contrainte de puiser
dans les ressources culturelles et symboliques dont elle dispose. C’est donc le
religieux qui se trouve convoqué dans les deux cas, quoique sous des modalités
différentes. Dans le premier cas sont organisées des célébrations interreligieuses
réunissant des représentants des principaux cultes. Quant aux obsèques
nationales, on ne saurait être surpris de voir le religieux sollicité pour
s’acquitter de cette mission. Régine Azria, « Les prières et le droit. Considérations
d’une sociologue », Droit
et cultures [En ligne], 51 | 2006-1, mis en ligne le 16
avril 2009, consulté le 16 juin 2014. URL :
http://droitcultures.revues.org/779
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