The Aryan Myth as Ideology
of the Nation in Tajikistan- Marlène Laruelle
This article analyses
the interactions that exist in Tajikistan between the historical science promulgated by
the Academy of Sciences and the political pressure exerted by the
authorities in favour of the constitution of an ideology justifying the
Nation-state. The two meet around the Aryan theme which has recently become one
of the most important historical and ethnological references in local academic
publications. The rehabilitation of Zoroastrism and the assertion of Tajikistan as the « cradle » of the Aryan
peoples, formalised by the presidential decree establishing 2006 as « Year
of Aryan Civilisation », are being accompanied by numerous ethnicist and
racialist discourses that seek to assert the autochthony of Tajiks within a
despised Turkic environment. In the politic games of research of the origins
currently displayed in the region, Tajikistan wishes to establish itself as the only and
unique bearer of Indo-European heritage. The scientific ‘Arianistic’ obsession
goes together with an ethnic dissociation, if not racial, between Turkic people
and Indo-European people, as unique goal to proclaim the superiority of the
second. In contemporary Tajik issue, human sciences remain highly submitted to
political pressure even if, unlike in neighbouring Uzbekistan , it is yet possible to express a non-compliant
opinion. While only on a speech level expressed and far from any social and
political practices of the country, references focused on ‘race’ reveal important
ethnic definitions in research and speeches about the Nation in all Post-Soviet
Central Asia.
The Zoroastrianism acts
as tengrism in the neighbouring Turkic countries, as an intellectualized
neo-paganism for the former soviet elites in search for spirituality without
transcendence that conceive religion to assert their national identity.
Le
mythe aryen comme idéologie de la nation au Tadjikistan - Marlène Laruelle
Cet article analyse les interactions existantes, au
Tadjikistan, entre la science historique promulguée par l’Académie des sciences
et les pressions politiques des autorités en faveur de la constitution d’une
idéologie justifiant l’État‑nation. Cette rencontre se fait autour du thème
aryen, devenu depuis quelques années l’une des références historiques et
ethnologiques les plus importantes des publications académiques locales. La
réhabilitation du zoroastrisme et l’affirmation du Tadjikistan comme
« berceau » des peuples aryens, officialisées par le décret
présidentiel qui instaure 2006 comme « Année de la civilisation
aryenne », s’accompagnent de nombreux discours ethnicistes et racialistes
cherchant à affirmer l’autochtonie des Tadjiks au sein d’un environnement
turcique méprisé.
Dans les jeux de recherches des origines en cours
actuellement dans la région, le Tadjikistan tient à se présenter comme le seul
et unique détenteur de l’héritage indo‑européen de l’Asie centrale. L’obsession
‘aryaniste’ de certains milieux scientifiques tadjiks va en effet de pair avec
la volonté d’une dissociation ethnique, si ce n’est raciale, entre peuples
turciques et peuples indo‑européens, dans le but bien évidemment d’affirmer la
supériorité des seconds. Dans le cas tadjik contemporain, les sciences humaines
restent grandement soumises aux pressions politiques, même s’il est encore
possible, à la différence par exemple de l’Ouzbékistan voisin, d’exprimer une
opinion non conforme. Bien que ne s’exprimant qu’au niveau du discours et
n’ayant aucune réalité dans la pratique politique et sociale du pays, les
références centrées sur la ‘race’ sont néanmoins révélatrices de
l’ethnicisation en cours des discours sur la nation dans l’ensemble de l’Asie
centrale post‑soviétique.
Le zoroastrisme joue ici le même rôle que le tengrisme dans
les pays turciques voisins, celui d’un néo‑paganisme intellectualisé pour des
anciennes élites soviétiques à la recherche d’une spiritualité sans
transcendance et qui conçoivent le religieux avant tout comme un élément de
l’affirmation nationale.
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