Retouch the photos of the dead, magical purposes of photos in Mongolia
The belief of the
possibility to physically act on a person through a picture is largely
widespread. In other words, magic would operate through things that look alike
those on which one wishes to act - images, figurines, corporal movements
imitation - or that have had contact with - hair, nails, cloths, etc. In
Mongolia people know photography since a long time, probably since the end of
the nineteenth century, although its practice remained for quite a while only
intended to members of aristocracy and eminent religious dignitaries. Mongolian
people also use photography as cosmological content. When someone dies, no
matter the age or the sex, a specific portrait is fabricated from an enlarged
and colorized ID photography. This framed portrait topped by a ceremonial blue
cloth (hadag) will be carried by a
child during the funerals, at the head of the procession. It will be later
shown in the dwelling of the dead close to the home family pictures where it
will be submitted to regular offerings incense, drinks and various food - tea, milk,
alcohol, fat meat and sweets. Mongolians did not wait the invention of
photography to display anthropomorphic figures in their houses. The survival of
an ancient tradition shows that at the turn of the twentieth century one could
find in Mongolian dwellings (mainly in Northern Buryat homes) wooden or felt
figurines, or human shapes painted on cloths, expected to draw up spirits and
used to feed them. These figurines are called ongon in the Khanate-Mongol world, a term as well for material
support (its etymology links it to the idea of 'container' or 'containing') as
for the spirit it is meant to host. According
to different sources, ongon host hungry spirits, put into them by the
shaman, in order to stop the trouble in the negatively impacted house. When
through this mean regularly fed with blood and fat meat, the evil-doers spirits
are expected to calm down and give up eating the flesh of the dwelling members
who right away regain their health. Inevitably, following the adoption of a
Soviet inspiration regime in 1924 and the consecutive violently anti-religious
policy icons themselves were banned. Nowadays, funerary portraits are framed
and exhibited hung on the Yurt roof rods, set among other family shots on large
chests at the back of the dwelling or suspended on the living room walls. As
before, the chests surface provides an altar upon which offerings are laid in
front of the funerary portraits and sometimes icons - but paradoxically less
often now than during the years 60's. Icons and portraits are clearly place on
a continuity plan : both are set on the same place at the back of the dwelling,
and very often the same way inside individual frames above or beside the family
shots. The continuity is being such that the word « icon » (burhan) is also used to
designate a funerary portrait. This is not only due to the fact that both images obtain the same offerings on the
chests - one can give offerings to deities set them in front of the funerary
portrait and conversely. On the forefront of cosmology one could assume that
the deceased will be remembered by analogy to the deities. Indeed, although it
is agreed in Mongolia that people "reborn" after death and despite an
ontological distinction usually done between the dead ant the displayed on
icons deities of the Bhuddist pantheon,
one way of say 'to die ' in Mongolian could literally be translated by to
"become a deity"(burhan
bolo-).
Funerary portraits
are made of an almost always enlarged identity photograph, colorized and
sometimes retouched done with the image retouching software Photoshop. Enlarging
a photo, colorizing and showing the dead as an icon allow the Mongolians to
adorn the deceased with a new, more glorious body. In effect, all indicates
that retouching the deceased photography, making his/her funerary portrait is
the first step in the process of ancestralisation that is carried out along
with the end of mourning rituals, forty nine days after the funerals. During
all this days, offerings in front of the deceased portrait are intended to him
individually ; they are to be given during commemorative luncheons(budaalga) seven and
twenty one days after the funerals. Those offerings are expected to accumulate
merits (buyan)
for the deceased in order to ensure a good renaissance (closer to an human
being, further from an animal). Instead of a direct action on the dead body,
Mongolians use photography, a powerful duplicate that holds something from the
deceased and at the same time is very alike. It will be possible to measure how
here, one thing is concretely considered by saying that the portrait often is
topped by the same ceremonial silk cloth (hadag)
that was set on the mouth and nose of the deceased to receive his last breath.
http://terrain.revues.org/15390
Retoucher les morts, les usages magiques de la photographie en Mongolie
La croyance en la possibilité d’agir
physiquement sur une personne à travers une image qui la figure est largement
répandue. Autrement dit, la magie opérerait à travers des choses qui
ressemblent à celles sur lesquelles on veut agir – images, figurines ou
imitations gestuelles – ou qui ont été en contact avec elles – cheveux,
ongles, vêtements, etc. La photographie est connue en Mongolie de longue date,
probablement depuis la fin du xixe siècle, bien que sa
pratique soit longtemps restée réservée aux membres de l’aristocratie et aux
plus hauts dignitaires religieux. Les Mongols font aussi de la photographie un
usage cosmologique. Lorsqu’une personne meurt, quel que soit son âge ou son
sexe, un portrait particulier est fabriqué à partir de sa photographie
d’identité agrandie et colorisée. Ce portrait, encadré et surmonté d’un tissu
cérémoniel de soie bleue (hadag),
sera porté par un enfant le jour des funérailles, en tête de cortège. Il sera
ensuite exposé dans le foyer du défunt, auprès des photos de famille de la
maisonnée, où il recevra des offrandes régulières d’encens, de boissons et de
nourritures diverses – notamment du thé au lait, de l’alcool, de la viande
grasse et des sucreries. Les Mongols n’ont pas attendu l’invention de la
photographie pour exposer des figurations anthropomorphes dans leurs foyers. La
survivance d'un tradition vieille de quelques siècles montre qu'au tournant du xxe siècle,
on trouvait dans les foyers mongols (surtout chez les Bouriates septentrionaux)
des figurines de bois ou de feutre, ou des formes humaines peintes sur un
tissu, censées figurer des esprits et utilisées pour les nourrir.
Ces figurines sont appelées ongon à travers le monde sibéro-mongol, un
terme qui désigne à la fois le support matériel (son étymologie le lie à la
notion de « récipient » ou de « contenant ») et l’esprit
qu’il est supposé accueillir. D’après les sources, les ongon
servent de supports à des esprits affamés, qui y sont introduits
par un chamane afin qu’ils cessent de semer le trouble dans un foyer affecté.
Nourris régulièrement de sang et de viande grasse par cet intermédiaire, les
esprits fauteurs de trouble sont censés s’apaiser et renoncer à dévorer la
chair des membres de la maisonnée, qui dès lors recouvrent la santé. Bien
entendu, avec l’adoption d’un régime d’inspiration soviétique en 1924 et la
politique violemment antireligieuse qui s’en est suivie, les icônes elles-mêmes
ont été bannies. Aujourd’hui,
les portraits funéraires sont exposés dans des cadres individuels suspendus aux
perches du toit des yourtes, posés au milieu des vitrines de photos de famille
sur les larges coffres qui occupent généralement le fond des habitations, ou accrochés
aux murs du salon. La surface de ces coffres sert comme auparavant d’autel, des
offrandes y étant déposées devant les portraits funéraires et devant les icônes
qui les accompagnent parfois – mais paradoxalement moins souvent
à présent qu’à la fin des années 1960. Icônes et portraits funéraires, au
demeurant, sont clairement placés sur un plan de continuité : tous deux
sont exposés au même endroit, dans le fond des habitations, mais souvent aussi
de la même manière, dans des cadres individuels installés au-dessus ou à côté
des vitrines de photos de famille. La continuité est telle que le terme
« icône » (burhan)
sert aussi à désigner les portraits funéraires. Cela n'est pas seulement dû au
fait que les deux images reçoivent indifféremment les mêmes offrandes sur les
coffres – on peut adresser des offrandes aux divinités en les disposant
devant les portraits funéraires, et inversement. Sur le plan cosmologique, il
pourrait sembler que les défunts sont pensés par analogie à des divinités. En
effet, bien qu’il soit généralement admis en Mongolie qu’une personne
« renaît » après sa mort, et malgré une distinction ontologique nette
faite habituellement entre les morts et les divinités du panthéon bouddhique
figurées sur les icônes, l’une des expressions pour dire « mourir »
en mongol peut se traduire littéralement par « devenir divinité » (burhan bolo-).
Les portraits funéraires sont
fabriqués à partir d’une photographie d’identité presque toujours agrandie,
souvent colorisée, et parfois retouché à l’aide du logiciel de retouche
d’images Photoshop. En agrandissant une photographie d’identité, en la
colorisant et en présentant le mort sous la forme d’une « icône »,
les Mongols le parent d’un corps nouveau, un corps glorieux. En réalité, tout
porte à croire que la retouche de la photographie du défunt, la fabrique de son
portrait funéraire, n’est que la première étape d’un processus
d’ancestralisation qui s’accomplit avec la fin des rituels de deuil,
quarante-neuf jours après les funérailles proprement dites. Pendant toute cette
période, les offrandes déposées devant son portrait lui sont spécifiquement
destinées ; elles sont principalement réalisées à l’occasion de repas
commémoratifs (budaalga),
sept et vingt et un jours après les funérailles. Ces offrandes sont
censées permettre d’accumuler des « mérites » (buyan) pour le compte du
défunt, de manière à lui garantir une « bonne renaissance » (plus
près d’un humain, plus loin d’un animal). Plutôt que d’agir sur le cadavre pour
accomplir cette transmutation, les Mongols utilisent sa photographie, un double
puissant qui retient quelque chose du défunt en même temps qu’il lui ressemble. On pourra mesurer à quel point ce
quelque chose est envisagé ici de manière concrète en mentionnant que le
portrait est souvent surmonté du tissu cérémoniel de soie (hadag) qui a été posé sur
la bouche et le nez du défunt immédiatement après sa mort, pour recueillir son
dernier souffle.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire